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Harcèlement scolaire : enquête au niveau de la cité scolaire d'Arsonval
                                      par Laurençon Althéa le 16/11/2021

Chaque année en France, on recense plus de 700 000 élèves harcelés, tous niveaux confondus. Les causes de ce phénomène peuvent varier, mais cela dépend souvent d'une « différence » chez l'élève pris pour cible: surpoids, handicap, aspect physique qui déplaît à certain.e.s... L'arrivée de l'ère numérique et des réseaux sociaux n'a bien évidemment rien arrangé à ce problème, dans certains cas ils l'aggravent même... Nous pourrons citer la jeune Chanel, 12 ans, qui a préféré se donner la mort plutôt que de parler de son mal être au collège, ou encore Alisha, 14 ans, tuée par ses camarades.

En effet, le harcèlement scolaire pousse trop souvent des jeunes à commettre l'irréparable. Depuis le début de l'année 2021, 18 jeunes se sont donnés la mort pour ne plus avoir à subir ces brimades quotidiennes, et combien d'autres ont tenté de le faire, ou y ont simplement pensé ?

J'ai pu interviewer des jeunes ayant été harcelés, pour savoir ce qui leur été arrivé, et comment ils ont réussi à s'en sortir. Je les remercie grandement pour leur courage, car parler est souvent compliqué.


 

 


 


Anonyme

Durant quelle période as-tu été harcelé.e ?

Je me suis fait harceler de la 6e à la 3e.

Quelles étaient les manifestations de ce harcèlement?Recevais-tu des coups,des insultes ?

C'était principalement des moqueries et des insultes. Il y a aussi eu un peu de violence physique mais ce n'était pas spécialement des coups, par exemple je me suis fait cracher dessus. C'était des personnes différentes chaque année et chacun faisait différemment.

Comment l'as-tu vécu dans l'instant présent?

C'est très flou, j'en ai assez peu de souvenirs en soit notamment en année de 6e. Souvent c'est une sorte de flou, de rires, de cris qui n'étaient pas très agréable.

As-tu osé en parler autour de toi ? A tes parents, à un.e professeur.e,un.e CPE... ?

Non, pas du tout. En fait, ce qui s'est passé à chaque fois c'est des élèves, des surveillants ou des professeurs qui remarquaient que quelque chose n'allait pas et qui venaient en parler soit à mes parents parce que comme ma mère est orthophoniste elle voyait certains des élèves qui étaient dans mon collège ou soit aux surveillants ou au CPE directement. Du coup, je me faisait convoquer avec mes harceleurs sauf que ce qu'il se passait c'est que mes harceleurs se retournaient contre moi en disant que je n'étais qu'une « grosse balance » et finalement c'était pire qu'après que j'en ait parlé.

En gardes-tu des séquelles encore aujourd'hui? Si oui,lesquelles ?

Alors oui j'en garde des séquelles aujourd'hui, par exemple, je suis en dépression ce qui est quand même une séquelle assez importante et j'ai aussi une très mauvaise estime de moi. Surtout, j'ai très peur que ça recommence donc dès que les gens vont se foutre de ma gueule ou des choses comme ça, j'ai tout de suite le réflexe de me dire que ça va recommencer et je peux me mettre à pleurer dans ces situations-là.

Aurais-tu un message à faire passer aux jeunes victimes de harcèlement ou même aux potentiels harceleurs ?

Alors oui ; d'en parler même si ça ne va pas fonctionner comme moi, il faut savoir qu'au moins j'ai été cru et rien que le fait de se dire que la souffrance est réelle ça peut aider des gens. Ca peut les aider de se dire qu'ils ne sont pas seuls et qu'il y a des gens qui nous soutiennent comme ils peuvent. Du côté des harceleurs, je sais qu'ils n'ont pas conscience de ce qu'il se passe, surtout au collège, mais dès que vous vous moquez régulièrement de la même personne, ça peut virer au harcèlement. Il faut toujours être conscient que ce n'est pas parce que vous trouvez quelque chose drôle que la personne en face va le trouver drôle. Je sais qu'il y a aussi l'effet de groupe et tout ça mais ça ne vous rendra pas plus cool que les autres.


 



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Axel

Durant quelle période as-tu été harcelé.e ?

Alors déjà je tiens quand même à préciser que je n’ai pas vécu un harcèlement « ordinaire », c’est-à-dire que je ne manquais pas d’amis mais beaucoup de gens s’en prenaient à moi quotidiennement, mais en soit pas grand monde faisait quelque chose pour changer ce qu’il se passait. Du coup ça a commencé fin novembre 2019, après, comme je l’ai dit ce n’étais pas un harcèlement classique donc je dirai que ça s’est arrêté à la fin du collège (puisqu’en soit je me faisait lyncher) mais il y a toujours des restes,par exemple je ne suis pas très apprécié.

Quelles étaient les manifestations de ce harcèlement? Recevais-tu des coups,des insultes ?

Alors je n’ai jamais reçu de coups, encore heureux, mais beaucoup d’insultes répétitives, des rumeurs, des photos/vidéos ont été détournées et j’étais surtout ajouté dans des groupes où je m’en prenais plein la poire.

Comment l'as-tu vécu dans l'instant présent?

Alors je l’ai vécu extrêmement mal car avant j’étais un enfant qui rentrait dans les cases (hétéro et cisgenre d’apparence) et vu que mon coming out a surtout été fait par d’autres gens, on m’a obligé à me « dévoiler », ce qui fait que je me suis renfermé encore plus et que j’essayais encore plus de rentrer dans les cases physiquement parlant (j’assumais d’être lgbt, j’en parlais juste pas, mais pour mon apparence je rentrais dans la case du garçon cis et hétéro car j’avais peur de cette « nouvelle vie »). Au début ça m’a fait extrêmement peur et j’ai eu la sensation que ma vie ainsi que le regard des autres allaient totalement changer et c’est une sensation très dérangeante.

As-tu osé en parler autour de toi? A tes parents,à un.e professeur.e,un.e CPE... ?

Ma mère avait découvert un des groupes dans lequel j’étais ajouté en regardant mon téléphone, car elle a senti que quelque chose n’allait pas. Je lui disais toujours « t’inquiètes maman,je gère » après avoir fait mon coming out (enfin ma mère l’a fait à ma place car elle a deviné parce que j’étais trop renfermé) et en fait pour elle ça a été choquant qu’on s’en prenne à son seul et unique enfant. Un jour, elle a craqué et a été parler à la CPE qui m’a cru. Elle a voulu convoquer les autres, mais ensuite est arrivé le confinement donc elle m’a juste quotidiennement demandé avant qu’on soit enfermés chez nous comment j’allais. Ensuite, l’enquête n’a pas abouti, mais ce que je dirai toujours c’est que cette CPE était géniale car elle a toujours su me rassurer ainsi que rassurer ma mère et je ne lui en serai jamais assez reconnaissant.

En gardes-tu des séquelles encore aujourd'hui? Si oui,lesquelles ?

Je pense avoir gardé des séquelles. Il faut savoir que moi-même je suis perdu car je ressens des choses que je n’explique pas et je sais pas si ça vient d’une agression étant petit ou du harcèlement. Je sais malgré tout que beaucoup de gens parlent de moi négativement sans même que je les connaisse. Je sais que cela ne vient pas forcément de ce harcèlement mais d’autres histoires mais cela a débuté à cause du harcèlement. J'étais détruit et je faisais n’importe quoi sans m’en rendre compte. Ensuite, j’ai toujours eu peur quand il s’agit de devoir faire connaissance avec des mecs (dans ma classe ou autres) car plus de la moitié des gens qui me faisaient subir ça étaient des garçons, et quand j’étais petit je n’avais pas d’amis,que des amies, donc je me suis toujours dit que j’allais être rejeté. Aujourd’hui, j’arrive quand même à côtoyer des mecs ainsi que des filles, mais il y aura toujours un blocage naturel quand je parlerais avec un gars, juste par peur instinctive. Ma paranoïa a aussi extrêmement augmenté à force d’être lâché ,etc...Je pense toujours beaucoup trop et à tout cela se rajoute mon agression passée aussi.

Aurais-tu un message à faire passer aux jeunes victimes de harcèlement ou même aux potentiels harceleurs ?

Pour les élèves lgbt surtout assumez vous, n'ayez jamais peur, vous allez penser que la pire des choses c'est de se faire outer par et à tout le monde, alors que ça engendrera la meilleure chose : pouvoir un jour s'assumer sans tenir compte des avis des autres, avant on m'a forcé à m'assumer et je m'étais renfermé sur moi-même, et maintenant je fais TOUT l'inverse.

Aux harceleurs : on veut bien comprendre que vous ayez des complexes d'infériorité, des problèmes, des choses à cacher, mais harceler quelqu'un ne fera que vous rabaisser, et surtout, après, vous en payerez les frais.


 



 


Et à l'échelle d'Arsonval, comment cela se passe-t-il si on est victime de harcèlement? J'ai voulu demander à des personnes ayant un rôle important dans la vie lycéenne ce qu'il en était, et comment pourrait-on aider les élèves harcelés ou potentiellement victimes. C'est ainsi que je suis allée interviewer, une CPE de notre lycée, Mme Bézanger :


 

Si vous êtes victimes ou témoins de harcèlement n'hésitez pas à en parler. Si vous avez honte, ou que vous êtes timides, tentez d'en toucher un mot à un.e professeur.e avec lequel vous êtes à l'aise ou des amis. Ne restez pas seul.e.s, c'est important. Tu n'es pas le problème, le tabou autour du harcèlement l'est.

N'oubliez pas non plus que des numéros verts existent pour lutter contre le harcèlement,notamment le 30 20,ou le numéro Net Ecoute 30 18 en cas de cyberharcèlement.

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